Parcours
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par Denis Demonpion
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P120 | |||||
Le Jour se lève de Marcel Carné
collection Paris Île-de-France
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Amoureuse invétérée de Paris, Arletty incarne l’actrice gouailleuse de la capitale, le Titi parisien au féminin. Parmi ses
grands rôles, Madame Raymonde et sa fameuse "gueule d’atmosphère" dans Hôtel du Nord et l’inoubliable Garance des Enfants du paradis.
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Quoique née à Courbevoie avec des escales à Belle-Ile le temps des bains de mer, Arletty incarne la Parisienne, taille de
haricot vert et gouaille des faubourgs mêlées. Du canal Saint-Martin, reconstitué en studio, où, inimitable, elle immortalisa
l'une des plus célèbres répliques du cinéma, au pont Mirabeau, où elle vécut les dernières années de sa vie, son empreinte
d'artiste indomptable et de femme affranchie est encore vivace.
Après des débuts au théâtre des Capucines en août 1919 sur les boulevards - elle a vingt et un ans - et des années à courir
le cachet dans les cabarets, enchaînant les représentations à raison de deux ou trois le même soir, Arletty, petite fille
de revue, impose son style piquant, libre, nature. Tel qu'il éclate, pointu et acidulé, dans Hôtel du Nord.
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Qu'importe, elle signe. Elle s'engage pour Hôtel du Nord, l'adaptation cinématographique de l'œuvre éponyme d'Eugène Dabit. Ce roman populiste, paru en 1929, raconte, sans flafla
ni pathos, la vie des petites gens industrieux que l'auteur a longtemps observée dans cet immeuble de rapport plus ou moins
sordide du 102, quai de Jemmapes. Les parents de Dabit en étaient les propriétaires. Ouvriers et cheminots y louent un garni
à la semaine ou au mois pour une somme modique. La façade grisâtre donne sur le canal, les péniches, l'écluse.
Un décor de carte postale, reconstitué au cinéma par Alexandre Trauner, qui imprimera sa marque dans les grands films de Carné avec Arletty, du Jour se lève aux Enfants du paradis. Entre le bal du 14 juillet sous les lampions et les repas pris en commun, les jours s'écoulent, plats, vides, monotones.
N'était-ce la présence de deux couples : d'un côté deux amoureux éperdus et désespérés qui n'aspirent qu'à en finir, de l'autre,
un "mac" et une péripatéticienne.
Les mots claquent. Cette trouvaille sortie du chapeau de Jeanson, fécond prestidigitateur du verbe, fait entrer Arletty dans
les annales du cinéma. Tout comme plus tard l'hôtel du Nord, lui-même. Lorsqu'en 1989, les spéculateurs s'avisent de remplacer
l'édifice décrépit par des appartements de standing, les amoureux du vieux Paris s'émeuvent. "Autant démolir la tour Eiffel !", s'amuse Arletty, priée de donner son avis. Classée monument historique, la façade est sauvée. En revanche, les studios de
Billancourt, où la scène a été tournée, ne résisteront pas aux pelles des démolisseurs. Morale de l'histoire : Billancourt
n'est pas Paris, n'en déplaise aux nostalgiques.
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Tirée d'une pièce de Paul Armont et Marcel Gerbidon, les dialogues semblent avoir été écrits pour elle. Tout comme la chanson,
composée par André Sablon, le frère du crooner Jean Sablon, qu'elle fredonne, sur un air d'accordéon, non sans un fond de
tristesse romantique :
On me trouve un minois mieux que joli,
Du moins on me le dit,
Et ce compliment me ravit.
Il paraît que j'ai un petit accent
Gentil, drôle et troublant,
Qui vaut un regard caressant.
J'ai l'air de voir la vie en rose
Mais mon cœur rêve d'autre chose...
Aimer, sincèrement de mon cœur tendre
Celui qui pourrait me comprendre,
Et s'il le fallait me défendre,
Aimer, ah je veux vivement qu'il vienne
Celui qui bercera la peine
De mon âme de Parisienne... |
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Quatre ans plus tard, Maxime, prénom d'un séducteur joué par Charles Boyer, cherche sur des dialogues de Jeanson à renouer avec l'époque révolue du cabaret
et du gai Paris. On y voit le célèbre restaurant Art Nouveau Art Déco de la rue Royale, Maxim's, et une Arletty, en coquette
vieillie, à l'accent traînant et à la gouaille retrouvée. Mots d'auteur, aphorismes, calembours, c'est un festival. Un rôle
en or pour cette Parisienne qui, à la ville, tout à son amour de la capitale, emprunte volontiers à Molière ce cri du cœur
: "Hors Paris, point de salut".
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Cette filmographie reprend l'ensemble des films cités dans ce parcours thématique évoquant la capitale, ainsi que d'autres
films complémentaires sur le même sujet.
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de Jean Boyer
avec Arletty et Michel Simon
fiction, 1939, noir et blanc, 1h26min
La comédienne Arletty, série Aujourd'hui en France
de Fernand Moszkowicz
documentaire, 1985, couleur, 4min39s
de Pierre Prévert et Marcel Duhamel
documentaire, 1959, noir et blanc, couleur, 22min
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Arletty, Philippe Ariotti et Philippe de Comes, Editions Henri Veyrier, 1978
La Défense, Arletty, Ramsay, coll. Poche cinéma, 1990
"Je suis comme je suis...", Arletty, Carrère, 1987
Les mots d'Arletty, Claudine Brécourt-Villars, V&O Editions, 1991
Les enfants du paradis, Marcel Carné et Jacques Prévert, Balland, 1974
La vie à belles dents, Marcel Carné, Belfond, 1989
Arletty, jeune fille dauphinoise, Louis-Ferdinand Céline, La flûte de Pan, 1983
Arletty, Denis Demonpion, Flammarion, 1996
Nouveaux portraits, Françoise Giroud, Gallimard, 1954
Arletty, Michel Perrin, Calmann-Lévy, 1952
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Le Paris de Marcel Carné, par Claude-Jean Philippe | |||||||
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Le Paris d'Alexandre Trauner, par Jean-Pierre Berthomé | |||||||
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Le Paris de Michel Simon, par Claude Gauteur | |||||||
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Le Paris de Louis Jouvet, par Olivier Barrot | |||||||
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Le jour se lève : une partition de Maurice Jaubert, par François Porcile | |||||||
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Chantons à Paris ! | |||||||
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Denis Demonpion
Journaliste à l'hebdomadaire Le Point depuis 1996 après avoir travaillé à Paris Match, l'Agence France-Presse et Libération, Denis Demonpion a écrit un remarquable ouvrage consacré à Arletty qu’il a eu le privilège de connaître pendant les dernières
années de sa vie et dont il restitue merveilleusement la tonalité de la voix.
juillet 2004
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