Parcours
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par Thierry Paquot
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P112 | |||||
Boulevard de Julien Duvivier
collection Paris Île-de-France
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Décor de courses-poursuites ou de séquences oniriques, les toits de Paris ont inspiré de grands classiques du cinéma et aussi
de nombreux films plus méconnus que nous vous proposons de découvrir.
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La fenêtre d'une mansarde donne à voir la ville comme une image de télévision, cadrée, pas toujours nette, mais attachante
et mystérieuse. La vue aérienne de la ville lui confère, à la fois, une puissance proche du vertige et un calme digne d'un
lac étal, silencieux et romantique. Pourtant, un rien suffit à briser cette immobilité et à démultiplier le tumulte de la
ville : l'éclair au loin d'un néon qui déchire la nuit, la cavalcade d'un groupe de tagueurs, la pluie frappant les pentes
des toits de ses coups répétés… Bref, le toit se transforme en théâtre pour des ombres chinoises aux destins incontrôlés.
Le cinéma n'oublie pas sa filiation avec la lanterne magique et n'hésite pas à faire du toit un haut lieu de ses délires.
Décor de courses-poursuites entre gendarmes et voleurs (Le voleur de paratonnerres, Paul Grimault, 1945), chambre improvisée pour un couple d'amoureux (Paris qui dort, René Clair, 1923), terrain d'actions terroristes (Pierrot le fou, Jean-Luc Godard, 1965), aire inattendue pour pique-niquer (Le locataire, Roman Polanski, 1976), jouer du violoncelle (Delicatessen, Jean-Pierre Jeunet et Marc Caro, 1991) ou somnambuler (Mille millièmes, Rémi Waterhouse, 2002), le toit participe symboliquement à la saisie du cosmos et permet d'embrasser d'un regard fier et
conquérant la ville entière, ses dômes, ses bulbes, ses clochers et parfois de découvrir des jardins suspendus, des cabanes
incongrues, des excroissances plus ou moins légales.
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Qu'on songe à Sous les toits de Paris (René Clair, 1930), Le million (René Clair, 1930), Hôtel du Nord (Marcel Carné, 1938), Le jour se lève (Marcel Carné, 1939), La nuit fantastique (Marcel L'Herbier, 1941), Seul dans la nuit (Christian Stengel, 1945), Les portes de la nuit (Marcel Carné, 1946), Gervaise (René Clément, 1955), Notre-Dame de Paris (Jean Delannoy, 1956), Pot-Bouille (Julien Duvivier, 1957) et bien d'autres films d'époque (dits "en costumes" ) ou contemporains, policiers ou sentimentaux. A chaque fois, les toits sont entraperçus et les scènes dans les mansardes
courtes et secondaires par rapport à l'intrigue, comme dans Un Américain à Paris (Vincente Minelli, 1951).
Il en est de même pour les scènes tournées en plein air, elles utilisent bien souvent le toit ou la mansarde juste le temps
d'une prise comme dans Ascenseur pour l'échafaud (Louis Malle, 1957) ou encore dans deux séquences de Paris vu par… (Jean Rouch, Jean Douchet, 1965). Dans Paris au mois d'août (Pierre Granier-Deferre, 1965), les personnages interprétés par Charles Aznavour et Susan Hampshire s'installent sur les
rebords du toit pour tendrement s'aimer alors que ceux de La grande vadrouille (Gérard Oury, 1966) s'enfuient sur les splendides toits de l'opéra afin d'échapper aux soldats allemands provoquant le rire
des spectateurs. Ce comique de situation est absent de la pathétique scène entre Laurent Terzieff et Bernard Fresson - il
s'agit d'une menace de suicide - dans La prisonnière (Henri-Georges Clouzot, 1968)…
Les cascades se multiplient dans Fantômas (André Hunebelle, 1964) où Jean Marais, agile et téméraire, semble voler d'un toit à un autre ; Peur sur la ville (Henri Verneuil, 1974) avec un Jean-Paul Belmondo acrobate ; Nuits rouges (Georges Franju, 1974) ou encore Frantic (Roman Polanski, 1987). Dans ces films d'action, les personnages bondissent d'un toit à un autre (Yamakasi, Ariel Zeitoun, 2000), brisent des verrières, se rattrapent à des corniches ou à des gouttières (Panique, Julien Duvivier, 1946), s'accrochent à un câble arrimé à un hélicoptère (La fille de l'air, Maroun Bagdadi, 1992). Le paysage chaotique des toits renforce la sensation de tension, de malaise, de suspense que ressent
le spectateur.
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18, rue Popincourt (Pascal Lauthier, 1991) raconte l'histoire des habitants d'un immeuble du XIe arrondissement avec un humour non dénué de
causticité. Tandis qu'avec Chacun cherche son chat (Cédric Klapisch, 1995), pas nécessairement de gouttière, une nouvelle urbanité se déploie dans un quartier en totale reconversion
- celui de la Bastille. Dans La haine (Mathieu Kassovitz, 1995), le trio banlieusard effectue une virée bien mouvementée dans la capitale et se pose, au lever
du jour, sur ses hauteurs et philosophe face à cette mer de maisons, de monuments, de réseaux au repos.
Un repos qui annonce la tempête ! Irma Vep (Olivier Assayas, 1996) détourne les Fantômas de Feuillade et ne peut pas éviter une scène de toit pour conforter sa parodie ! Le rythme saccadé produit par la caméra
sur l'épaule procure à Louise (Siegfried, 1998) un tremblé, une excitation que renforce la course sur les toits de l'opéra ou sur des toits plus ordinaires
que parcourt sans répit Elodie Bouchez.
Avec Peut-être (Cédric Klapisch, 1999), Paris est une ville entièrement ensablée, nous sommes en 2070 et les toits des immeubles cossus
du XIXe siècle sont accessibles depuis les pistes qu'empruntent de drôles d'équipages. On se dit que la plage est bien vaste
et la mer bien loin, mais les toits, greniers, cheminées et autres mansardes ne représentent plus le danger, mais l'épuisement
d'une société endormie.
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Un film mérite, dans cette brève sélection, une mention spéciale, c'est Boulevard (Julien Duvivier, 1960). Jean-Pierre Léaud, qui se réfugie régulièrement sur le toit de l'immeuble où il habite, seul et
cafardeux, une mansarde, y décrit avec passion les toits de Paris et plus particulièrement ceux du quartier Pigalle. Il déclare,
à la jeune Marietta, qu'il aimerait s'installer "sous une tente avec un jardin et Paris, là, tout autour…" . Rêve de toit ? Rêve d'un rebelle mal-aimé ? Etre sur le toit au plus haut de la ville et la contempler pour se convaincre
de la vanité du monde…
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Cette filmographie reprend une sélection de films cités dans ce parcours thématique évoquant la capitale. |
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Le toit, seuil du cosmos, Thierry Paquot, Alternatives, 2003
Entre ciel et terre, les toits de Paris, Catherine Vialle, Parigramme, 2000
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Paris souterrain | |||||||
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Le Paris d'Alexandre Trauner, par Jean-Pierre Berthomé | |||||||
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Thierry Paquot
Thierry Paquot est l'auteur de plusieurs ouvrages consacrés à l'architecture et à l'urbanisme, notamment La ville au cinéma (co-dirigé avec Thierry Jousse, 2005). De 1994 à 2012, il fut l'éditeur de la revue Urbanisme.
février 2004
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